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Chapitre 1 Il débarque en pays étranger.

Il débarque. Il a bien pris l’avion. Il a bien montré son passeport à la douane, par deux fois. À chaque passage de la frontière, il a bien été le chercher dans la poche de son sac à dos son passeport et l’a tendu à un fonctionnaire assis dans une guérite en verre. Il va bien récupérer sa valise. Sa valise contiendra ces choses qu’il a prévu pour son déplacement, qu’il a choisi de prendre avec lui en vue de son déplacement. Pourtant il pensait retrouver des visages connus de lui dans l’avion, mais il n’a reconnu personne. Sorti sur le tarmac, il a pris le bus et il a bien récupéré sa valise avec son contenu, il est passé par la douane, qui a apposé un tampon circulaire et encré sur une page vierge et pratiquement carrée de son passeport. Mais il regarde autour de lui et il est seul. Il n’avait pas pensé à grand’ chose mais avait tout de même attendu quelque personne de l’hôtel ou du groupe organisateur soit présent pour l’accueillir et le guider. Rien. Il attend debout à côté de sa petite valise à roulettes, en pays complètement étranger, soudain conscient du ridicule de sa situation et de combien il se sent fragile en ce moment précis. Il ne comprend rien. Il saisit la poignée en plastique de sa valise et sa paume rencontre bien deux vis métalliques qu’il connaît bien et qui l’accompagnent depuis son départ de son appartement. Il fait basculer sa valise vers l’avant pour qu’elle tienne en équilibre sur ses deux roulettes avant et il commence à marcher d’une foulée exagérément grande mais ferme dans un long corridor. Les yeux sur les affiches publicitaires qui l’entourent sont comme dans chaque aéroport du monde, il vit une expérience à laquelle il ne s’attendait pas. Il prend peu l’avion si ce n’est pour des raisons sérieuses, comme aller visiter un membre de sa famille dans un pays étranger ou participer à un congrès. Mais depuis qu’il a reposé pied sur terre les signes qui l’entourent ressemblent plus à des traits posés au hasard et il se met à douter de son jugement propre. Il franchit une porte vitrée qui s’ouvre automatiquement vers l’extérieur. Il fait un pas dehors et le temps le frappe comme à la fois profondément humide et profondément chaud. Ses lunettes sont couvertes instantanément de buée. Il entend quelques oiseaux chanter, des mobylettes ou des motos passer, il sent des passants le frôler, les voitures alignées, les voyageurs héler les taxis. Il essuie enfin ses lunettes sur sa chemise 95% coton à manches courtes et à motifs ananas petits singes et parapluies. Le tissu est trop neuf, synthétique et rêche pour bien bannir la buée des verres. Il lève la tête vers un panneau. De toutes façons il ne voit rien et quand il remet ses lunettes il ne sait toujours pas ce qu’il a devant les yeux.

Situation politique.

Il rentre à nouveau dans le hall de l’aéroport et trouve une machine où des gens ofnt la queue pour échanger des devises et se retrouve vite en possession de billets de banque marqués de chiffres énormes. S’il faisait un petit effort de concentration peut-être pourrait-il au moins commencer à décrypter les dessins sur les billets qu’il tient en main. D’un côté une vallée encaissée où s’étend une ville naissante d’où s’élève une fumée industrieuse. Et de l’autre côté, croqués par des traits unis, verdâtres ou violacés, un Général dont le visage garde net et imberbe un menton relevé vers l’horizon. Sur ce billet il ne peut là encore rien lire de ce qui serait le nom du pays où il se trouve. Nous sommes en Mauritanie ou au Cambodge, en tout cas dans un pays jeune dont le guide souhaite faire tourner les usines et enrichir les villes. Les gens sont quasiment absents de ces billets. Pas un animal, non plus, pas un zébu, pas même un chameau, ce qui exclue donc la Mauritanie (il fait trop humide pour la Mauritanie).

Notre héros a maintenant de quoi survivre le temps de retourner chez lui, mais il ne sait pas d’où il va partir. Il sort à nouveau de l’aéroport. Un taxi passe, qui l’mmeène en ville, à l’hôtel Ibis. Du nom de la chaîne où il devait séjourner. Il espère pouvoir contacter par le réseau mondial l’hôtel où il a sa réservation initiale. Il ne sait pas que dans le pays les communications sont coupées. Internet est bloqué. Le courrier n’est plus acheminé depuis des jours ou des semaines. Les rares fois où une lettre arrive à destination, elle a été lue et relue par plusieurs comités populaires agricoles. Des tracteurs parés de grands rubans jaunes stationnent au milieu de la place principale de la capitale. Un peu plus loin, des paysans ont installé un campement autour de la statue de l’ancien Roi, dont la calotte traditionnelle en feutre noir brodé de motifs d’arbustes dorés, symbole de la force et des racines du pays, semble être l’innamovible fierté de ce mays et de ces gens. Si on parcourt encore la rue, on arrive à un pont gardé par des chars de l’armée, eux aussi parés de rubans jaunes. Une partie de la campagne s’est donc liguée avec des militaires pour occuper la capitale. La vie est paralysée. Les ambassades étrangères sont inaccessibles ou fermées.
Voilà qui ne va pas aider le héros de cette histoire à rentrer chez lui. Pour le moment il a été débarqué devant l’hôtel Ibis, pas loin du centre ville.


#2, ce qu’il.elle ne sait pas

Les éléments sur lesquels insiste la vidéo :

  • dans la première proposition, la voix narrative s’attachait directement à ce personnage évoqué à la troisième personne, sans nom ni prénom, un il ou un elle (ou juste des infinitifs), au présent de l’indicatif, dans une situation archétype de début de roman, « quelqu’un arrive quelque part » ;

  • une telle voix narrative n’est jamais, pour autant, l’expression directe de l’auteur, et ne l’engage pas, elle est le dispositif amont relié à l’objet de la narration ;

  • c’est une deuxième strate narrative qu’on va déployer pour ce 2ème exercice : on sera très attentif à l’idée qu’il ne s’agit pas non plus d’un déploiement de l’auteur, mais d’une nouvelle strate, à la fois indépendante de la première et liée à ce qu’elle décrit : une voix narrative omnisciente, qui va se déployer depuis chacun des éléments qui contextualisent le premier texte : les lieux, les circonstances, les personnes, les intérieurs de bâtiments, les signes et circulations…

  • donc une strate narrative participant de la même distanciation, comme de la même neutralité, mais cette fois s’attachant à tout ce qui englobe le narrateur, et qui a été évoqué, même d’un simple mot (façade, bruit) dans le premier texte : va se dire ici tout ce qui n’est pas accessible au il.elle du premier exercice, ce qui ne lui est pas perceptible ;

  • selon la forme graphique (format, paragraphes) du premier exercice, il pourra s’agir d’un texte nettement séparé, et l’article publié dans le blog sera uniquement cet exercice (avec la catégorie correspondance), soit il vous est difficile de séparer les deux, que le deuxième ait besoin du premier pour être compréhensible, ou s’établir, ou bien qu’il s’y entremêle : alors le nouvel article du blog peut reprendre le texte #1 (mais on crée quand même un nouvel article) ;

  • et bien sûr, accepter l’interaction de la 2ème strate sur la 1ère : possible de reprendre, corriger, développer ou mieux orienter le texte de départ, que vous conserviez sa version initiale ou la recouvriez par la nouvelle ;

  • à mesure que ce mouvement de départ va s’étoffer (les deux prochaines propositions émaneront aussi de ces nappes de départ), chacun.e pourra commencer à travailler à l’élaboration de son fichier global, pour lesquels on créera une plateforme d’échange réservée aux participants ;

  • ce qu’il.elle ne sait pas : ce ne sont pas des interrogations, puisque la « voix narrative » est omnisciente, et par de ces éléments contextuels cités dans le premier texte, et n’est pas l’auteur, ne répond pas à des interrogations ou perceptions de l’auteur… prendre un par un ces éléments de réel évoqués d’un mot (ou d’une figure) dans votre texte du premier exercice, et les nourrir, mais comme d’un constat de fait : voici ce qu’il.elle ne sait pas concernant cette façade, cette ville, cette fenêtre, ce visage, cette voiture, mais l’auteur non plus n’a pas besoin de le savoir, et vous le découvrirez parce que cela s’écrit depuis ce déploiement narratif, strate qui recouvre la première, s’y ajoute par transparence…

  • nul besoin de rhétorique (et parfait que cela coïncide avec la proposition #2 du cycle progression : la notion d’accumulation, juste aller chercher ces éléments, les empiler sans tri, les disposer à plat, sans chercher causalité ni relation de l’un à l’autre… c’est dans cette complexité de relation entre réel et récit qu’on veut avancer, pour ce 2ème exercice….